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31 mars 2006 5 31 /03 /mars /2006 08:29

 

Nous connaissons le centre de loisirs Ambroise Croizat,

mais qui était


Ambroise Croizat, l’homme social

 

À l’heure des dangers de remise en cause de la Sécurité sociale, n’oublions pas la grande oeuvre du " ministre des travailleurs ".

 

Par Michel Étiévent, écrivain

 

Ouvrez le Larousse 2004. Vous y trouverez sans difficulté Johnny Hallyday ou Rika Zaraï.

En cette année de tous les dangers pour la Sécurité sociale, on s’attendait forcément à trouver Ambroise Croizat, son bâtisseur. Rien !

À la place, un vague Croizy, inconnu qui, dit-on, s’illustra dans les boucheries guerrières de Louis XIV. Comme quoi le dictionnaire n’est pas innocent.

À l’attention de tous les dictionnaires ou livres scolaires à venir, une petite biographie de l’homme qui nous a laissé ce qui fut sans doute l’une des plus belles conquêtes de la dignité.

Ambroise naît un 28 janvier 1901 à Notre-Dame-de-Briançon en Savoie. Comme peut naître alors un fils d’usine. Son père, Antoine, est manoeuvre. Douze heures par jour devant l’éclat des fours.

On vit encore à cette époque la misère qui court les pages de Germinal. Accidents de travail quotidiens, pas de Sécu, pas de mutuelles, encore moins de retraites. Le degré zéro de la protection sociale.

L’espoir, c’est le père qui l’incarne. En 1906, il lance la première grande grève en Rhône-Alpes. Une grève pour exister, " vivre, juste vivre décemment ", disait-il. Dix jours de bras croisés qui forcent le patronat à reconnaître la caisse de secours ouvrière.

Une grève pour le droit à la santé, tout simplement. Il l’obtient, mais de vieilles revanches l’invitent à s’embaucher ailleurs.

 

1907. Ugine, nouvelle usine, nouvelle grève pour le père, nouveau lock-out. Il faut partir, errer encore. On file vers Lyon, où Ambroise prend le relais du père parti pour les horreurs de la guerre.

En 1914, il est ajusteur.

Derrière l’établi, résonnent les mots du père : " Ne plie pas petit. Marche dignement, le siècle s’ouvre pour toi. "

Le chemin va s’ouvrir dans une manifestation contre la guerre où Ambroise adhère à la CGT, puis à la SFIO. À dix-sept ans, il est sur tous les terrains de luttes et anime les grandes grèves de la région lyonnaise. Reste à faire le pas. Il entre au PCF au congrès de Tours. " On le voyait partout, raconte un témoin d’époque, devant les usines, au cours des assemblées paysannes. Humble, modeste, proche du peuple d’où il venait. "

Antimilitarisme, anticolonialisme, les deux mots tissent le chemin d’Ambroise, qui devient secrétaire de la Fédération CGTU des métaux en 1928. La route à nouveau, militant de base, suscitant les grandes grèves de Marseille, de Bordeaux ou de Lille, entre soupe populaire et prison de passage. Sur le terreau de la crise germe le fascisme. " S’unir, plus que jamais s’unir, pour donner à la France d’autres espoirs. " Ces mots vont cimenter la route de l’union qui mène au Front populaire et dont il devient le député.

De l’Assemblée nationale aux arrière-cours d’usines anonymes, il va laisser avec d’autres les plus belles conquêtes qui fondent l’identité sociale de la France : congés payés, quarante heures, et surtout loi sur les conventions collectives, dont il est l’auteur.

 

1939. Le soleil de mai 1936 décline. Hitler pose ses pattes sur les frontières.

Il est arrêté le 7 octobre avec trente-cinq autres députés communistes, connaît quatorze prisons avant d’être déporté au bagne de Maison Carrée, près d’Alger. Trois ans de coups, de cris, avant d’être libéré et de rejoindre, au titre de la CGT clandestine, la commission consultative autour du général de Gaulle. Là mûrissent les rêves du Conseil national de la résistance, en particulier la Sécurité sociale, dont Ambroise trace les contours dès mars 1943. " En finir avec la souffrance et l’angoisse des lendemains ", clamait-il à la tribune en juillet 1944.

Reste à bâtir l’idée. Le chantier est énorme. Il commence quand Ambroise est nommé au ministère du Travail en novembre 1945. 138 caisses de Sécurité sociale bâties en deux ans, par des anonymes après leur temps de travail ou sur les congés.

 
Mais là ne s’arrête pas l’héritage de celui que tous appellent déjà le " ministre des travailleurs ". De 1945 à 1947, il laisse à l’agenda du siècle ses plus beaux acquis : la généralisation des retraites, un système de prestations familiales uniques au monde, la médecine du travail, la prévention dans l’entreprise, les comités d’entreprise, le statut des mineurs, celui des électriciens et gaziers (cosigné avec Marcel Paul), sans oublier les lois sur la formation professionnelle, la caisse d’intempéries du bâtiment, les classifications de salaires.

 

En 1950, alors que la maladie le ronge, ses derniers mots à la tribune sont encore pour la Sécurité sociale : " Jamais, disait-il, nous ne tolérerons qu’un seul des avantages de la Sécurité sociale soit rogné.

Nous défendrons à en mourir et avec la dernière énergie cette loi humaine et de progrès. " Un cri lancé vers nous, comme un appel à faire de la Sécurité sociale, au-delà des démantèlements annoncés, ce qu’il a toujours voulu qu’elle soit : un vrai lieu de solidarité, un rempart contre la souffrance, le rejet et l’exclusion.

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